Par Charline Froitier et Nicolas Damesin
Les Assises Européennes de la Transition Énergétique sont chaque année l’occasion de partager et de découvrir des initiatives locales et collaboratives qui font la transition énergétique en France et en Europe. Elles réunissent des milliers de professionnels : politiques, collectivités locales, professionnels de l’énergie, offreurs de solutions, chercheurs… tous sont là pour faire connaitre leurs initiatives et découvrir celles des autres. C’est une grande plateforme de partage qui chaque année fait naître de nouvelles collaborations.
Cette année à Genève, un peu plus d’un an après l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris, l’urgence d’agir face au réchauffement climatique et ses conséquences désastreuses se fait sentir dans les prises de paroles de chacun. Les politiques territoriales sont pleines d’espoir, les collectivités engagées, et quelques initiatives locales encourageantes ; malgré tout, on attend encore que davantage d’actions soient mises en œuvre.
On retiendra de notre participation aux Assises : cette forte implication des territoires et la nécessité d’une action coordonnée de l’échelle globale à l’échelle locale ; les collectivités présentes et impliquées ; ainsi que les stratégies de coopération entre régions européennes (Rhône-Alpes, Lombardie, Catalogne, etc.) qui rencontrent des défis énergétiques similaires et qui s’engagent conjointement dans la transition énergétique.
Transition énergétique : regards croisés en Suisse et en France
Au regard des coûts imputables aux changements climatiques, les investissements dans des solutions de réduction des émissions de gaz à effet de serre s’avèrent indispensables économiquement.
La Suisse a présenté en mai 2017 sa stratégie énergétique 2050 avec notamment l’objectif d’un approvisionnement énergétique 100% renouvelable. Parmi les leçons à tirer au cours des dernières années, on retiendra que la Suisse a mis en place une taxe CO2 sur les combustibles fossiles depuis 10 ans, qui finance la rénovation énergétique des bâtiments ; et une écotaxe depuis 2001 qui finance le développement des infrastructures ferroviaires. Aussi, la Suisse a déjà fait la preuve du découplage en enregistrant une diminution de 10% de ses émissions GES de 1950 à 2015 et parallèlement une croissance de la population et une croissance économique.
Côté français, le Plan Climat présenté par Nicolas Hulot en juillet 2017 affiche un objectif de neutralité Carbone à l’horizon 2050. On note cependant aujourd’hui une augmentation des émissions CO2 (nov 2017), et un retard sur les objectifs de réduction du carbone fixés. La France a proposé quelques mesures phares telles que l’interdiction des nouvelles exploitations d’hydrocarbures, ou encore la fin de la vente des voitures à moteurs thermique en 2040, mais il reste un long chemin à faire. A venir : la mise en place des CTE pour accompagner, aider et soutenir les territoires dans leur transition écologique, tout en continuant les actions engagées avec la LTEPCV.
Des enjeux techniques
La mobilité électrique : elle apparait comme un enjeu majeur avec une transition rapide de la flotte de véhicules qui s’accompagne d’une réflexion sur l’installation des bornes de recharge sur le territoire et sur les impacts sur les réseaux électriques.
Le gaz : profiter des réseaux de gaz existants et de la possibilité de stockage qu’ils offrent en valorisant le recours au gaz propre plutôt que d’exclure le gaz des scénarios prospectifs. Le développement de solutions de stockage power to gas (électricité vers hydrogène) témoigne des possibilités offertes par la complémentarité entre ces énergies.
Des enjeux juridiques et institutionnels
Les opérateurs de réseaux électriques font encore face à une interdiction de mettre en place leurs propres solutions de stockage. Les stratégies de régulations se font actuellement à l’échelle des Etats alors que pour envisager des stratégies interrégionales, c’est à l’échelle de l’Europe que ces régulations pourraient être pensées.
En France, on observe également des difficultés à coordonner les actions prévues dans les PCAET et les orientations prises dans les documents d’urbanisme (PLU, SCOT, etc.). Des calendriers et des gouvernances différents combinés à des problèmes de données (récolte, compatibilité et capacités de traitement) expliquent en partie ces problèmes d’articulation entre stratégie climatique et urbanisme. Le projet ASCENS, dans lequel est impliqué l’EIVP, travaille actuellement à l’analyse de ces difficultés et à la formulation de recommandations.
Ça se passe à Genève
TOSA : un Trolleybus Optimisation du Système d’Alimentation (ou Transports publics genevois, Office de la promotion industrielle, SIG et ABB), système de bus électriques articulés à recharge rapide (20 secondes à l’arrêt de bus) avec la mise en service d’une ligne prévue à Genève en mars 2018 (un peu plus tard à Nantes). Un bel exemple de coopération public-privé.
GeniLAC : un projet de réseau de chaleur urbain alimenté par l’eau du lac Leman (eau à 7/8°C puisée à 45 m de profondeur) pour alimenter plusieurs boucles dont une boucle pour les grandes institutions, quelques quartiers récents, et bientôt le centre-ville et la zone aéroportuaire de Genève.
CREnHOM : projet européen (interreg) dédié à l’approche servicielle de la rénovation énergétique. Le projet s’intéresse tout particulièrement à la rénovation des hôtels alpins qui combinent des problématiques de vieillissement des équipements et de difficultés économiques (d’où l’intérêt d’aller au-delà de ROI à 30 ans). Des innovations en termes de bouquets de travaux préconçus et de garanties de performance sont ainsi testées.
Des messages porteurs d’espoir pour le grand public
Les Assises étaient accompagnées d’évènements ouverts au grand public, et notamment la projection de 2 films : Demain, en présence de Cyril Dion, co-réalisateur du film, et Solar Impulse, en présence de Bertrand Piccard qui lance un appel à 1000 solutions innovantes avec la Fondation Solar Impulse (soutenue par ENGIE notamment).